12.11.06

Isabelle Renaud

L’Alboum


Le taxi s’arrêta rue de L’Oliveraie, sous le soleil. Ils dégagèrent du coffre la poussette et les sacs, payèrent le chauffeur et la voiture fila.
– On est où, papa ? demanda la petite en prenant Tigrou dans ses bras.
– Chez mes parents, dit David. Ce sont tes grands-parents aussi, ils s’appellent Hector et Regina.
Ils poussèrent le portail du jardin et tout de suite entendirent les accords galopants d’une cantate de Bach. Derrière la fenêtre, une vieille dame de dos était installée au piano, cheveux blancs coupés court et robe de chambre bleue. Sophie prit l’enfant dans ses bras.
– Regarde Alice, c’est ta grand-mère !
Elle tapa au carreau, la grand-mère se retourna et sa bouche fit un O de surprise. Aussitôt la silhouette sortit du cadre, et la porte d’entrée s’ouvrit. David se retrouva vigoureusement enlacé, Sophie, la nuque tiraillée, reçut un baiser sonore sur le crâne. La petite restait en retrait, observant cette vieille dame agitée, en pantoufles et chemise de nuit.
– Alice ! Alice ma chérie, viens voir ! J’ai fait une crèche pour toi !
Regina attrapa l’enfant par la main et les précéda dans le couloir. Dans le salon, sur la table basse recouverte d’un crépon turquoise, se dressait une crèche de Noël avec des bateaux, des poissons, de petits pêcheurs de terre glaise. Regina se baissa pour allumer une guirlande électrique.
– Regarde Alice, comme c’est joli ! Cette année, le thème, c’est la mer !
La petite regardait le sol, serrait son tigre contre elle.
– Papa n’est pas là ? demanda David en repliant la poussette d’un coup de genou adroit.
– Oh, ton père ! Il est à l’hôpital. Il a fait l’andouille toute la journée d’hier avec ses championnats d’échecs, et…
La petite s’approcha de la crèche, tendit les mains vers un bateau de guerre.– Alors Alice, ça te plaît ? s’empressa Regina en guidant la main de l’enfant sur la table.